Les personnes exposées à un attentat terroriste peuvent présenter de graves dommages psychologiques, et certaines seront plus à risques que d’autres de développer ces dommages. Afin d’améliorer la prise en charge de ces personnes, il est nécessaire d’identifier quelles sont les caractéristiques de celles qui présentent des symptômes de troubles de la santé mentale.

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Personnes exposées à un attentat terroriste, quel impact sur la santé mentale ?
Être exposé à un événement potentiellement traumatique comme un attentat terroriste c’est avoir été sur les lieux de cet évènement (directement ou indirectement menacé, témoin de la scène) ou avoir un proche qui était sur les lieux. Cela peut avoir des conséquences psycho-sociales sur ces personnes comme la détérioration de la santé mentale mais aussi sur la qualité de vie, sur les relations sociales et la vie familiale et professionnelle (1,2). Concernant la santé mentale, les personnes exposées à ce type d’événement sont susceptibles de présenter de graves dommages psychologiques dont les plus fréquents sont l’état de stress post-traumatique, l’anxiété et la dépression (3–6).
En France, 5% des hommes et 10 à 12% des femmes de la population générale présenteraient un état de stress post-traumatique au cours de leur vie (7).
Etat de stress post-traumatique chez les personnes exposées aux attentats de janvier 2015 en Ile-de-France
Les attentats perpétrés les 7,8 et 9 janvier 2015 en Ile de France (Charlie Hebdo, Porte de Vincennes, Montrouge et Dammartin-en-Goële) ont causé la mort de 17 personnes et ont blessés physiquement 20 personnes. L’enquête IMPACTS (Investigation des Manifestations traumatiques Post Attentats et de la prise en Charge Thérapeutique et de Soutien) a été menée entre Juin à Octobre 2015 (soit 6-10 mois après les attentats) et entre Juin et Octobre 2016 (soit 18-22 mois après les attentats).
Sur 123 personnes qui ont participé aux deux volets d’enquêtes, 16,3% à 6-10 mois puis à 14,6% à 18-22 mois présentaient un état de stress post-traumatique.
Notre étude a identifié les caractéristiques (socio-démographiques, sanitaires, conditions d’exposition aux antécédents, etc.) qui semblaient être plus présentes chez les personnes qui présentaient un état de stress post-traumatique (ESPT) à la fois à 6-10 mois et à 18-22 mois après les attentats de janvier 2015 en France.
Cette étude montrait que :
- Les personnes qui présentaient un ESPT à 6-10 mois étaient plus souvent celles qui avaient vécu d’autres situations traumatiques dans leur vie, se sentaient socialement peu soutenues ou qui avaient présenté des réactions péri-traumatiques pendant l’attaque. Par ailleurs, les personnes les plus exposées (blessées, prises en otages, directement menacées ou témoins directs des attaques) avaient plus de risque de présenter ces réactions péri-traumatiques.
- Les personnes qui présentaient un ESPT à 18-22 mois étaient plus souvent celles qui présentaient des troubles anxio-dépressifs.
- Quel est le lien entre 6-10 mois et 18-22 mois ? Cette étude indiquait de manière intéressante que les personnes qui avaient un EPST à 6-10 mois avaient plus souvent des troubles anxio-dépressifs et que ces personnes qui présentaient des troubles anxio-dépressifs étaient aussi celles qui présentaient plus souvent un ESPT à 18-22 mois.
Ce que nous apprend l’enquête IMPACTS, quel intérêt pour la recherche ? Notre étude met en évidence plusieurs résultats clés :
- Ce n’est pas directement le fait d’être « fortement » exposé à la scène traumatique qui influencerait la présence d’ESPT mais plutôt le fait de présenter des réactions péri-traumatiques (qui sont plus présentes lors d’une exposition forte).
- Le rôle important du soutien social sur la santé mentale.
- L’ESPT à 18-22 ne serait pas directement lié à une persistance d’ESPT à 6-10 mois mais ce serait plutôt l’EPST à 6-10 mois qui favoriserait la présence de troubles anxio-dépressifs qui eux-mêmes favoriserait la chronicisation de l’ESPT à plus long terme.
Conclusions
Notre travail suggère l’importance de fournir un soutien social à court terme pour prévenir la présence d’état de stress post-traumatique, mais aussi d’autres troubles comme l’anxiété et des troubles dépressifs qui pourraient participer à la chronicisation de l’ESPT.
Dans le cas de futurs événements traumatiques de masse, il nous parait donc important (a) de dépister davantage les réactions péri-traumatiques (b) de sensibiliser l’entourage des personnes exposées à l’importance de leur soutien et (c) de dépister les troubles anxieux et dépressifs ainsi que l’état de stress post-traumatique à court terme.
Références
- Verger P, Dab W, Lamping DL, Loze JY, Deschaseaux-Voinet C, Abenhaim L, et al. The psychological impact of terrorism: an epidemiologic study of posttraumatic stress disorder and associated factors in victims of the 1995-1996 bombings in France. Am J Psychiatry. 2004 Aug;161(8):1384–9.
- Gabriel R, Ferrando L, Cortón ES, Mingote C, García-Camba E, Liria AF, et al. Psychopathological consequences after a terrorist attack: An epidemiological study among victims, the general population, and police officers. Eur Psychiatry. 2007 Sep 1;22(6):339–46.
- Bonanno GA, Brewin CR, Kaniasty K, Greca AML. Weighing the Costs of Disaster: Consequences, Risks, and Resilience in Individuals, Families, and Communities. Psychol Sci Public Interest. 2010 Jan 1;11(1):1–49.
- Scholte WF, Olff M, Ventevogel P, de Vries GJ, Jansveld E, Cardozo BL, et al. Mental health symptoms following war and repression in eastern Afghanistan. JAMA. 2004 Aug 4;292(5):585–93.
- Kar N, Jagadisha, Sharma P, Murali N, Mehrotra S. Mental Health Consequences of the Trauma of Super-Cyclone 1999 in Orissa. Indian J Psychiatry. 2004;46(3):228–37.
- Cardozo BL, Bilukha OO, Crawford CAG, Shaikh I, Wolfe MI, Gerber ML, et al. Mental health, social functioning, and disability in postwar Afghanistan. JAMA. 2004 Aug 4;292(5):575–84.
- Jolly A. Evénements traumatiques et état de stress post-traumatique. Une revue de la littérature épidémiologique. Ann Méd-PsycholRevPsychiatr. 2000;(158(5)):370–8.
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